21 janvier 2008

L'Art modeste


"L'art modeste est l'art de rendre la vie plus belle", écrit Hervé di Rosa, dans ce livre dans lequel il nous entraîne dans une sorte d'inventaire, à la fois visite guidée et tour du monde, de cette création protéiforme, souvent ludique et toujours surprenante, qui se situe en marge et à la confluence de tous les arts. Ce que di Rosa appelle l'art modeste, ce sont les créations et les collections populaires qui, sans prétention, nous donnent du monde une version idéale et colorée, la plupart du temps très kitsch. L'art modeste, c'est le monde de l'enfance qui continue à s'épanouir chez l'adulte. C'est l'émotion esthétique débarrassée des carcans intellectuels du bon goût et du grand art. C'est l'émerveillement et le plaisir à la portée de tous et sans arrière pensée. C'est la profusion. Ce sont les sculptures en sable, les peintures mièvres ou ratées, les collections de poupées, les maisons faites de bouteilles, et bien d'autres choses encore. C'est sublime d'invention, de mauvais goût, de naïveté ; c'est rafraîchissant.
On prend un tel plaisir à parcourir les diverses régions de l'art modeste, que le seul défaut du livre c'est son goût de trop peu. Di Rosa aurait pu nous le mettre en dix volumes qu'on en aurait quand même redemandé.
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Hervé di Rosa, L'Art modeste,
Hoëbeke, Paris, 2007
ISBN 9782-84230-115-6
224 p.

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20 janvier 2008

Littérature pour ados

En surfant sur le net, je viens de retrouver un débat autour d'un article du Monde paru le 30 novembre 2007 et dans lequel la journaliste accusait certains livres pour la jeunesse, jugés trop noirs et trop violents, d'avoir une influence néfaste sur les adolescents.
J'avoue que ce genre de raisonnement me fait toujours beaucoup rire car, la littérature pour ados n'existant pas à mon époque, je suis passée directement de la bibliothèque verte à la série noire. C'est vers l'âge de 11 ans que j'ai plongé avec délice dans l'univers du polar américain avec Dashiell Hammett, Chester Himes ou Raymond Chandler, et dans celui des romans de gare français, plus particulièrement San-Antonio, SAS (y a-t-il plus gore et plus violent que cela dans la littérature pour ado actuelle ?) et L'Exécuteur.
Ma petite âme sensible ne s'est pas trop mal remise de toutes ces mauvaises rencontres (mauvaises selon les standards actuels du politiquement correct). Cela ne m'a rendue ni violente, ni alcoolique, ni débauchée.
L'adolescence est l'âge des grandes découvertes et des grandes expériences, et il vaut mieux se confronter à la violence du monde à travers un livre que d'aller y voir soi-même et de se prendre les coups en direct live. Tout livre vaut expérience. La littérature de gare, m'a, paradoxalement, protégée du monde en me débarrassant d'une naïveté qui aurait pu m'être funeste. L'ignorance est beaucoup plus dangereuse que la connaissance des réalités, si violentes soient-elles.
Les ados n'ont pas besoin d'une littérature spéciale, aseptisée et enjolivée, et qui n'a pour effet que de les maintenir artificiellement dans le monde des Bisounours. Qu'ils plongent directement dans celle des adultes, ils y gagneront du temps et de l'expérience !
Au demeurant, on peut se demander si la volonté de figer les adolescents dans une enfance prolongée n'est pas tout simplement la version contemporaine de ce désir de jeunesse qui animait les coquettes du XIXe siècle et les poussait à nier l'adolescence de leurs filles en continuant à les vêtir en fillettes.

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