04 août 2007

Du Cul(turel) au con(formisme)


En France, juillet et août sont des mois invariablement dédiés au sexe. C'est la tarte à la crème estivale. Tous les ans, tous les magazines font preuve du même manque d'imagination, du même conformisme en nous sortant leur "spécial sexe". Depuis les magazines de bonnes femmes qui enseignent à la ménagère moyenne l'orgasme multiple à la plage, jusqu'aux revues cul-turelles qui apprenne à la jeunesse poprockeuse qu'il n'y a rien de plus vrai que le bondage (Inrockuptibles, qui intitule le numéro Sexe 2007, probablement pour qu'on puisse le distinguer de Sexe 2006 et de Sexe 2008, car le sexe c'est tellement tout le temps la même chose qu'il faut bien quelques repères chiffrés pour introduire une différence), en passant par les revues d'arts qui, branchitude oblige, se mettent elles aussi au mauvais goût du jour (cf Beaux Arts Magazine). Parler de sexe est devenu un passage obligé pour qui ne veut pas être taxé de ringard. Les efforts de certains pour coller à la mode du moment en deviennent pathétiques.

C'est à Beaux Arts que je décerne la palme. Ils ont fait fort en invitant un tas de pipoles, qui parlent d'autant plus volontiers d'art qu'ils n'y connaissent rien (on se demande s'il en va de même pour le sexe). On y rencontre notamment quelques pseudo-intellectuaillons médiatiques, comme Guillaume Durand et BHL, qui y font leur numéro habituel. Le premier évoque Picasso dans le style vulgaire qui le caractérise et le second, qui n'a pas encore appris à écrire, a délaissé Ségo pour Le Bain turc de Raysse sur lequel il divague artistement dans le style vasouillardo-ampoulé qui fait tout son charme. Le clou du spectacle étant toutefois le dialogue Michel Houellebecq/Catherine Millet venus débattre de sexe. Cela donne :

Houellbecq : "Ce que je regrette dans la pornographie, c'est l'absence de bons dialogues."
Et la tarte muséale de rétorquer : "Je suis d'accord, car je suis très sensible aux mots obscènes..."

Reportez-vous au magazine pour la suite... Tout est à l'avenant et, pris au second degré, c'est du niveau mauvais sketch comique. Au premier degré, c'est tout simplement affligeant de bêtise.
Des dialogues dans les films pornos, si l'on veut, mais pas écrits par ces deux-là, car, comparés à leurs divagations, les soupirs et les grognements font carrément figure de thèse de philo.

Et pour qui n'en aurait pas jusque-là du sexe après avoir lu ces numéros spéciaux, Beaux Arts en propose un autre encore plus spécial, SEXES, décrit de la manière suivante : "livre d'images et de pensées d'un genre nouveau, cet ouvrage collectif saisit la façon dont les artistes posent aujourd'hui la question centrale du sexe. Une histoire de l'art particulière en phase avec la condition contemporaine". Pour être en phase avec la condition contemporaine, ça il est en phase, le bouquin d'images ! surtout en phase commerciale !!!
La question que le lecteur se pose désormais, c'est : combien de temps ce magazine va-t-il encore résister à la tentation de vendre des sex toys et des films pornos sous prétexte d'art ?

Ceci dit, hier, sur cinq expos visitées à Paris, deux portaient à l'entrée un avertissement concernant les œuvres choquantes qu'elles montraient. Qu'il s'agisse de sexe ou de violence, il y avait en effet des œuvres à ne pas mettre sous tous les yeux. Au train où vont les choses, il faudra bientôt soumettre les musées d'art contemporain aux mêmes réglementations sur les mineurs que les sex-shops et le cinéma X.
J'adore l'art contemporain, mais hier j'ai réalisé qu'il faut impérativement voir les expos avant de se risquer à y entraîner un enfant. Il y a souvent du beau, du ludique et du féérique, mais le répugnant n'est jamais très loin. Le musée, surtout d'art contemporain, n'est plus la destination idéale pour un dimanche en famille.

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