Velvet Goldmine - le film

de loin, en image arrêtée et floue,
la seule façon de trouver une vague ressemblance
de l'acteur avec son illustre modèle.
Velvet Goldmine, ou comment faire un film sur Bowie sans jamais prononcer son nom ni jouer une seule de ses chansons.
Le scénario :
Chargé de rédiger un article sur Brian Slade, star de la scène Glam Rock des années 70 qui a mis fin à sa carrière en organisant sa propre disparition, Arthur plonge dans ses souvenirs et revit l'ascension et la chute de son ancienne idole, et surtout la prise de conscience de sa propre homosexualité.
Je n'avais encore jamais vu ce film, et j'ai découvert que je n'avais rien perdu. J'avais lu qu'il s'agissait d'un film sur "la période Glam Rock", "le milieu Glam Rock anglais des années 70", mais en fait c'est un film sur Bowie uniquement, dont Brian Slade est la fade copie. Qu'il s'agisse de Bowie ne fait aucun doute, puis qu'on y reconnaît facilement tous ses looks successifs, depuis la veste en peau bordée de fourrure datant de l'époque de son mariage, en passant par la robe, puis Ziggy(*), pour aboutir à la caricature du Bowie oxygéné de l'époque du Moonlight Tour, que le réalisateur se fait alors un plaisir de ridiculiser, en le montrant en espèce de mégalomane fasciste.
On retrouve dans le film non seulement les vêtements, les attitudes et des détails bien connus de la vie de Bowie, mais on y trouve surtout les anecdotes sulfureuses, réelles, inventées ou réarrangées, et mettant en avant l'homosexualité de la star, car c'est l'homosexualité qui intéresse le réalisateur, Todd Haynes, et non le phénomène musical.
Ce qui me choque, personnellement, c'est qu'un réalisateur ait eu le culot de faire un film sur un artiste vivant et sans son accord en s'abritant derrière l'argument "fantaisie glam rock aux personnages fictifs", comme si l'on pouvait être dupes. C'est un procédé cavalier et répugnant, pour ne pas dire carrément malhonnête. Bowie a refusé sa musique et sa caution, et il a bien fait. Le plus surprenant, c'est de voir, alors que la plupart des acteurs de l'époque sont toujours vivants et qu'on a des archives en abondance, combien tout dans ce film sonne faux et toc. C'en est confondant. L'analyse imposée par Haynes, est, comme l'est presque immanquablement la vision hollywoodienne des phénomènes culturels étrangers, complètement dépourvue de nuances et de subtilité.
Les acteurs sont consternants. Jonathan Rhys Meyers en Bowie et Ewan McGregor en Iggy Pop/Lou Reed ont autant de charisme qu'une brosse à dent. Autant dire que c'est un peu juste pour incarner des figures mythiques du rock. Val Kilmer avait fait beaucoup mieux en Jim Morrison. Bowie/Ziggy, sur scène, avait la grâce fatale d'un prédateur. Jonathan, le malheureux, avec sa grosse lippe inexpressive, est aussi fascinant qu'un canard en peluche. Pas de quoi électriser les foules. Si Bowie avait eut cet air mollasson et insipide, on ne l'aurait jamais remarqué. Même Toni Colette, qui joue le rôle de l'épouse, n'arrive pas à la cheville de son modèle, n'ayant pas réussi à reproduire l'hystérie prétentieuse, maniérée et ultra speed de la véritable Angie Bowie, qui, dans son genre, valait aussi le détour.
Quant aux costumes, ils sont carrément lamentables. Le Glam Rock n'a jamais été réputé pour son bon goût, mais avec quelques limites que le film a quand même réussi à dépasser. Les stylistes semblent n'avoir pas saisi la différence qui existe entre le costume de la période Glam Rock et le costume de revue de cabaret. Ainsi, on voit Brian Slade arriver sur scène avec une espèce de collerette de plumes digne d'une meneuse de revue du Lido, et qui m'a fait bien rire en me rappelant les habits emplumés du castrat Farinelli dans le film du même nom. Bonjour le look moderniste ! Les costumiers du film ont visiblement pensé qu'il suffisait de coller des paillettes, du lamé et des plumes partout, pour avoir un look années 70. Tout ce qu'ils ont obtenu, c'est du glam façon drag queen ou carnaval de Rio. Erreur de dosage et de style !
On a du mal à croire que le Haynes de Velvet Golmine est aussi l'auteur du très beau Loin du Paradis (Far from Paradise). Faire de l'épopée Glam Rock une banale aventure homosexuelle avec le grand Bowie en porte-drapeau de la cause, est extrêmement réducteur, car la recherche de l'époque c'était la liberté sexuelle, l'abolition des genres, l'androgynie, dont la relation homosexuelle était seulement un épiphénomène. Bowie a touché toute la jeunesse, aussi bien les garçons que les filles, aussi bien les hétéros que les homos. J'ai le sentiment, à voir la façon dont Bowie est traité dans ce film, que le réalisateur lui en veut d'avoir refusé de représenter la cause gay, et d'être officiellement retourné à la norme hétéro - d'où la caricature vengeresse de la fin du film. Bowie faisait une si belle icône ! C'est à la mise à mort de l'icône, pour crime de haute trahison, que procède ce film. Ce n'est ni plus ni moins que de l'intégrisme homo.
Enfin, tout ce monde-là s'est donné beaucoup de mal pour un résultat pitoyable. Comment, sérieusement, faire un film sur le milieu musical anglais des années 70 et sur Bowie sans une seule chanson de Bowie ? Même la bande son est plate, malgré les standards qu'elle reprend.
Pour montrer réellement ce qu'était le mouvement Glam Rock, il eût mieux valu rassembler des archives d'époque et en faire un montage. C'eût été cent mille fois plus intelligent et intéressant. Pourquoi faut-il qu'Hollywood trouve le moyen de rendre tout stupide, insipide et vulgaire ?(**)
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(*) - Les cheveux bleus au lieu de rouges ! Cela n'a pas manqué de me rappeler le film Mes Meilleures copains, quand le personnage interprété par Christian Clavier s'imagine que ses amis ne vont pas se reconnaître dans son roman parce qu'il a changé les noms et la couleur des cheveux.
(**) - J'ai vu, récemment, le film Chapeau Melon et Bottes de Cuir (The Avengers), avec Ralph Fiennes et Uma Thurman, et, vraiment, pour faire, à partir de cette série britannique géniale, un film aussi débile, il faut un don ou un entraînement spécial, car cela ne peut venir naturellement. A-t-on jamais rien vu de plus grotesque que ces savants déguisés en ours en peluche ? Mauvais, très mauvais ! Gros, gros, méga-navet !
l'équivalent, probablement, du Spider from Mars- la seule image du film intéressante
au point de vue de l'esthétique.


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