L'Art pris au mot

L'Art pris au mot ou comment lire les tableaux...
Alain Jaubert, Valérie Lagier, Dominique Moncond'huy, Henri Scepi
Gallimard, 2007,
ISBN 978-2-07-077605-4
Présentation de l'éditeur.
Que comprenons-nous des tableaux que nous voyons ? Et d'abord, que voyons-nous ? Des couleurs, des formes agencées, des perspectives plus ou moins justes ? Que reconnaissons-nous de nous-mêmes, de notre quotidien, de notre imaginaire ? Qu'est-ce qui nous touche, nous émeut, nous fait frissonner ou nous ravit ? Que lisons-nous ? C'est à toutes ces questions que cet ouvrage répond en proposant de cheminer parmi trente chefs-d'œuvre, depuis la position du spectateur innocent jusqu'à celle de l'amateur éclairé. Regarder, comprendre, aimer : un parcours idéal. Dans ces 30 lectures de tableaux : un face-à-face permanent avec la littérature (une centaine de textes cités) ; des informations techniques, des anecdotes vivantes, des ouvertures sur d'autres expressions artistiques, sous forme d'encadrés ; d'autres tableaux qui réinterprètent le thème (plus de cent reproductions). Et pour garder sous les yeux les tableaux commentés : 30 reproductions sous forme de fiches.
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Ne rêvez pas, malgré le sous-titre prometteur - "comment regarder les tableaux..." -, vous pourrez lire le livre tout entier que vous le refermerez sans avoir appris comment lire une oeuvre. Il me semble que l'intention de départ était de faire une sorte de version papier de ce qu'Alain Jaubert nous livrait jusque-là dans ses documentaires. Excellent, me direz-vous, si vous avez apprécié les films. L'idée était assurément bonne, mais c'est la mise en oeuvre qui pose problème. Le documentaire, avec la possibilité offerte de manipuler les formes et d'intervenir sur les images pour illustrer les propos, avait un côté démonstratif et pédagogique que le livre n'a pas. Et, surtout, il y avait, dans les documentaires, une rigueur et une clarté qui font grandement défaut au livre.
Question de méthode : L'art pris au mot tient moins de l'analyse d'oeuvres que de la littérature sur l'art, voire, quelquefois, de la masturbation littéraire. L'art, ici, n'est pas "pris" au mot, il est "englué" dans la prose. Les auteurs accumulent les adjectifs et les phrases qui sonnent bien. Il privilégient la forme au fond, et se complaisent trop souvent dans cet intellectualisme obscur et creux qui est malheureusement la marque de fabrique des écrits contemporains sur l'art. L'interprétation des oeuvres, quelquefois intéressante, parfois douteuse, ou très discutable, car il ne s'agit que de points de vue personnels que, la plupart du temps, rien ne vient étayer, finit noyée dans cette espèce de logorrhée maniériste.
Toujours animés du désir d'en faire plus, au lieu de rester dans l'explication d'une seule oeuvre et de s'en tenir à elle, les auteurs extrapolent et profitent du sujet de la peinture pour s'attaquer en même temps à un ou plusieurs thèmes liés. Et voilà donc que, au beau milieu de l'analyse d'un tableau, le thème devient prétexte à des digressions sur d'autres oeuvres d'autres temps, voire même à dresser l'historique sommaire d'un genre ou d'une technique. On s'y perd.
Et puis, comme si cela ne suffisait pas, on trouve encore, insérés un peu au hasard au beau milieu des commentaires d'oeuvres, des encarts en caractères de couleurs, et qui contiennent des citations, des explications techniques, ou des considérations n'ayant, la plupart du temps, qu'un rapport lointain avec le texte qu'ils viennent parasiter. Tout cela contribue à renforcer l'impression de coq à l'âne, d'amoncellement brouillon, qui se dégageait déjà des analyses.
L'ouvrage ressemble une sorte de fourre-tout assez rebutant. Le format choisi, relativement petit, et le fait que l'éditeur ait resserré textes et images afin de gagner sur le nombre de pages (déjà impressionnant : 573), ne contribue pas qu'un peu à la sensation d'étouffement produite par l'ensemble. Cela se lit, mais il faut être motivé.
Curieux manque de clarté pour une oeuvre qui se veut éclairante et surtout terrible manque de discipline pour qui prétend faire oeuvre pédagogique.
L'idée était bonne, l'ouvrage est érudit, mais, c'est, pour parler crûment, un vrai foutoir. C'est, assurément, pour tous les étudiants en histoire de l'art, un bel exemple de ce qu'il ne faut pas faire en manière de commentaire d'oeuvres.
Alain Jaubert, Valérie Lagier, Dominique Moncond'huy, Henri Scepi
Gallimard, 2007,
ISBN 978-2-07-077605-4
Présentation de l'éditeur.
Que comprenons-nous des tableaux que nous voyons ? Et d'abord, que voyons-nous ? Des couleurs, des formes agencées, des perspectives plus ou moins justes ? Que reconnaissons-nous de nous-mêmes, de notre quotidien, de notre imaginaire ? Qu'est-ce qui nous touche, nous émeut, nous fait frissonner ou nous ravit ? Que lisons-nous ? C'est à toutes ces questions que cet ouvrage répond en proposant de cheminer parmi trente chefs-d'œuvre, depuis la position du spectateur innocent jusqu'à celle de l'amateur éclairé. Regarder, comprendre, aimer : un parcours idéal. Dans ces 30 lectures de tableaux : un face-à-face permanent avec la littérature (une centaine de textes cités) ; des informations techniques, des anecdotes vivantes, des ouvertures sur d'autres expressions artistiques, sous forme d'encadrés ; d'autres tableaux qui réinterprètent le thème (plus de cent reproductions). Et pour garder sous les yeux les tableaux commentés : 30 reproductions sous forme de fiches.
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Ne rêvez pas, malgré le sous-titre prometteur - "comment regarder les tableaux..." -, vous pourrez lire le livre tout entier que vous le refermerez sans avoir appris comment lire une oeuvre. Il me semble que l'intention de départ était de faire une sorte de version papier de ce qu'Alain Jaubert nous livrait jusque-là dans ses documentaires. Excellent, me direz-vous, si vous avez apprécié les films. L'idée était assurément bonne, mais c'est la mise en oeuvre qui pose problème. Le documentaire, avec la possibilité offerte de manipuler les formes et d'intervenir sur les images pour illustrer les propos, avait un côté démonstratif et pédagogique que le livre n'a pas. Et, surtout, il y avait, dans les documentaires, une rigueur et une clarté qui font grandement défaut au livre.
Question de méthode : L'art pris au mot tient moins de l'analyse d'oeuvres que de la littérature sur l'art, voire, quelquefois, de la masturbation littéraire. L'art, ici, n'est pas "pris" au mot, il est "englué" dans la prose. Les auteurs accumulent les adjectifs et les phrases qui sonnent bien. Il privilégient la forme au fond, et se complaisent trop souvent dans cet intellectualisme obscur et creux qui est malheureusement la marque de fabrique des écrits contemporains sur l'art. L'interprétation des oeuvres, quelquefois intéressante, parfois douteuse, ou très discutable, car il ne s'agit que de points de vue personnels que, la plupart du temps, rien ne vient étayer, finit noyée dans cette espèce de logorrhée maniériste.
Toujours animés du désir d'en faire plus, au lieu de rester dans l'explication d'une seule oeuvre et de s'en tenir à elle, les auteurs extrapolent et profitent du sujet de la peinture pour s'attaquer en même temps à un ou plusieurs thèmes liés. Et voilà donc que, au beau milieu de l'analyse d'un tableau, le thème devient prétexte à des digressions sur d'autres oeuvres d'autres temps, voire même à dresser l'historique sommaire d'un genre ou d'une technique. On s'y perd.
Et puis, comme si cela ne suffisait pas, on trouve encore, insérés un peu au hasard au beau milieu des commentaires d'oeuvres, des encarts en caractères de couleurs, et qui contiennent des citations, des explications techniques, ou des considérations n'ayant, la plupart du temps, qu'un rapport lointain avec le texte qu'ils viennent parasiter. Tout cela contribue à renforcer l'impression de coq à l'âne, d'amoncellement brouillon, qui se dégageait déjà des analyses.
L'ouvrage ressemble une sorte de fourre-tout assez rebutant. Le format choisi, relativement petit, et le fait que l'éditeur ait resserré textes et images afin de gagner sur le nombre de pages (déjà impressionnant : 573), ne contribue pas qu'un peu à la sensation d'étouffement produite par l'ensemble. Cela se lit, mais il faut être motivé.
Curieux manque de clarté pour une oeuvre qui se veut éclairante et surtout terrible manque de discipline pour qui prétend faire oeuvre pédagogique.
L'idée était bonne, l'ouvrage est érudit, mais, c'est, pour parler crûment, un vrai foutoir. C'est, assurément, pour tous les étudiants en histoire de l'art, un bel exemple de ce qu'il ne faut pas faire en manière de commentaire d'oeuvres.

1 Comments:
Je n'ai pas encore lu ce livre, je vais l'acheter aujourd'hui. Votre critique est probablement très juste.
Je me permets de vous donner l'adresse d'un ouvrage intitulé "Comprendre l'art moderne", qui paraît exclusivement sur le net.
Il a le même but. Je ne peux, bien entendu, pas encore les comparer.
En tout cas, Comprendre l'art moderne est écrit très simplement et très clairement. Son auteur analyses des toiles de Klee, Picasso, Matisse et nous dit pourquoi certaines sont réussies et d'autres ne le sont pas.
http://comprendrelart.unblog.fr/
Cordialement,
Eliane Larus, peintre
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